L’amour absolu au temps de l’absolutisme [Guest Star Valentin]

Lorsque Marine m’a très généreusement proposé de contribuer à son blog, bref, quand Marine m’a promis la richesse, la notoriété, le Goncourt, la première de couverture dans Grazia et une interview Les Yeux dans les Yeux sur Canal (et il faut bien le dire plein de prostituées aussi…), j’ai longuement hésité. D’une part je ne lis pas trop Grazia (ni les lauréats du Goncourt à vrai dire…) et, d’autre part, ma maman m’a toujours dit que le sexe tarifé c’était pas terrible terrible (n’en déplaise aux 343 salauds). Mais après avoir été menacé de mort par une inconnue arborant un sigle curieux (RMLH), je me suis dit que j’allais participer volontairement-de-mon-plein-gré et apporter ma « pierre à l’édifice » (tsss, l’autre amateur s’est trompé en parlant de dentifrice). Allez, alea jacta est et vive le Rubicon !
 
À l’École de la République, on apprend que la monarchie c’est pas bien car le roi avait tous les pouvoirs. Il suffisait qu’il dise ou écrive sur un bout de papier que c’était son « bon plaisir » pour que toutes ses volontés se réalisent. Il paraitrait même que Louis XIV avait un pouvoir ABSOLU…
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Henri IV

FAUX ! Oui le roi de France dispose d’une grande autorité mais NON il n’a pas TOUS les pouvoirs. Loin de là ! Pour vous prouver ça, je pourrais vous décrire tout le fonctionnement institutionnel de l’Ancien Régime, en vous disant que le roi doit sans cesse négocier avec les membres de son Conseil, ceux des parlements (les tribunaux hein), mais aussi les représentants du « peuple » aux états généraux et provinciaux, mais bla bla bla, on s’en tamponne le coquillard (enfin moi je kiffe mais « Je vous ai compris »). Au lieu de tout ça, je vais plutôt vous raconter un petit épisode de la fin du règne d’Henri IV, qui était tout autant absolutiste que Louis XIV (c’est-à-dire qu’il veut devenir un roi absolu mais il n’y arrive pas et n’y arrivera jamais).
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"Ce salaud de roi me pique ma meuf"

« Ce salaud pique ma meuf »

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Au mois de janvier 1609, Henri IV, alors âge de 59 ans, croise lors d’un bal la jeune princesse Charlotte-Marguerite de Montmorency, dont il tombe éperdument amoureux. Jusques ici tout est normal me direz vous : « on sait très bien que le roi avait une femme mais que ça ne l’empêchait pas d’aller voir ailleurs ! ». Oui oui oui ! Mais là où le bât blesse, c’est que la princesse en question est sur le point d’être fiancée. Ni une ni deux, le roi écrit une petite lettre sympathique à l’heureux élu, Bassompierre, pour lui dire à quel point il serait fâché si les fiançailles venaient à être prononcées :
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Gabrielle d’Estrées et Henri IV, elle a pécho le (cœur du) Roi.

Henri IV n’est pas encore tout à fait Roi de France (il est protestant), c’est un chaos politico-religieux monstre. Henri III est mort, sans enfant. En même temps, avec une femme stérile et des aspirations homosexuelles, c’était pas gagné. Et puis il n’y a aucun prétendant au trône, ses frères (François II et Charles IX) sont décédés sans enfant. Bref le bordel, la Ligue, les protestants, les Espagnols, les Anglais. On pédale dans le royaume.

Gabrielle d’Estrées, qui est-elle ?

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Petite blonde aux yeux bleus, Gabrielle est née en 1573 dans une famille que nous qualifierons d’aisée. Pour ne pas dire blindée.

A l’âge de 17 ans, elle est présentée par son amant à Henri IV. Coup de foudre, big love ♥ dans le cœur du Roi. Il n’en est rien pour la jolie blonde, en même temps, qui voudrait galocher un prognathe, même Roi de France, sans pouvoir prétendre au trône ? Henri IV est marié avec la Reine Margot, sœur d’Henri III, Charles IV et François II. Faut suivre. Eux-mêmes fils d’Henri II, le mec qui meurt borgne.

Cependant depuis une sombre affaire, Marguerite ne vit plus avec le Roi, elle est exilée à Usson.

Donc Henri IV est marié, il est protestant, et Gabrielle se refuse à lui. Difficile la vie Riri. Les choses vont s’arranger, presque. Gabrielle cède aux avances royales sous les conseils avisés de sa tante qui la voit déjà Reine. Et enfin, pour accéder définitivement au pouvoir, le Roi va se convertir au catholicisme en 1593. Selon la bienséance catholique, un homme marié, roi ou non, n’a pas à fricoter avec une femme célibataire, c’est pourquoi le Roi va arranger le mariage de Gabrielle avec Nicolas d’Amerval. Désormais, Gabrielle est la maîtresse en titre d’Henri IV. (La logique)

Le Big Love à l’épreuve des mariages

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Henri IV est fou de sa jeune et jolie maîtresse, il la couvre de présents et de coïts, si bien que Gabrielle accouche de trois enfants en quatre années : César, Catherine-Henriette (c’est cadeau) et Alexandre. De plus, les deux amoureux veulent faire annuler leurs mariages respectifs pour pouvoir s’unir ensemble. Pour cela, Gabrielle d’Estrées demande l’annulation de son mariage avec comme argument l’impuissance de son mari, qui empêche la consommation du mariage. Ceci étant complètement faux, Nicolas d’Amerval refuse. Si c’est classe de se faire piquer sa meuf par le roi, se voir humilier par des diffamations, il refuse.  D’autant qu’il a eu quatre enfants d’une première union. Ce sera un autre motif qui fera défaire leur mariage. En effet, la première épouse (décédée) de Nicolas d’Amerval était une parente plus ou moins éloignée de la famille de Gabrielle. Le mariage est donc considéré nul pour consanguinité.

* Découvrez une lettre d’amour du Roi pour Gabrielle *

Cependant, Marguerite de Valois n’est pas d’accord, et défaire un mariage royal n’est pas si simple. Les conséquences sont toutes autres. Même si elle sait que son mari ne l’aime pas, elle ne veut pas céder son statut de Reine de France à une « catin de petite noblesse ». De plus, le pape florentin Clément VIII appartient à la famille Médicis et aimerait qu’Henri IV se marie avec Marie de Médicis, plutôt qu’avec Gabrielle d’Estrées. Enfin, Sully, Ministre des Finances, constate clairement que les caisses de l’État sont vides. Un mariage avec les Florentins rapportera une dot intéressante et effacera la dette que le royaume de France a contracté auprès des Médicis pour financer le chaos la guerre. Le bras droit du Roi se place donc du côté du pape et de la Reine de France en s’opposant farouchement au mariage de celui-ci avec sa maîtresse.

 

Le Roi est mort, vive le… ah, non. C’est rien en fait.

En février 1599, Henri IV tombe malade. La vérité ? L’abbesse de Longchamp lui refile une saloperie sexuellement transmissible. Tout le monde se retrouve à son chevet. Affolement général. Des rumeurs courent déjà dans le royaume. Le Roi est mort. Les rumeurs, l’ancêtre de la presse à scandale. Le Roi est sur pieds en moins d’une semaine. En revanche, il a un peu pris conscience de l’état dans lequel il aurait laissé le Royaume si jamais il passait de l’autre coté. C’est pourquoi il va engager des pourparlers avec les Florentins. Pendant ce temps, Gabrielle, folle de joie et d’opportunisme face à la santé du roi, fait confectionner sa robe de mariée. Naïve.

Les devins de Gabrielle d’Estrées

Enceinte du Roi pour la quatrième fois, la grossesse la rend nerveuse et elle décide de rendre visite à trois célèbres devins. Elle va pas être déçue : le premier lui dit qu’elle ne connaîtra jamais de second mariage. Bim. Le deuxième, qu’un enfant va lui faire perdre toute espérance de mariage. BIM. Et le dernier annonce à Gabrielle qu’elle va mourir jeune et ne verra pas le prochain jeudi de Pâques (dans un mois.) BIMBAMBOUM.

Pendant la Semaine Sainte, il est de coutume que chacun calme ses ardeurs, le Roi ne se montre donc pas avec sa maîtresse. Celle-ci, alors qu’elle fréquente de très (très) près le protestantisme, ne rechigne pas à assister à chacune des cérémonies catholiques pour être bien vue par le peuple et autre pape florentin, ayant l’espoir d’obtenir enfin l’autorisation papale de devenir Reine. La nuit du 8 au 9 avril, Gabrielle est prise d’une crise de convulsions, elle étouffe mais trouve la force d’écrire à Henri IV pour lui dire de venir la rejoindre au plus vite. Au petit matin, on la découvre la tête toute tordue, complètement tirée vers la gauche -c’est pas bon signe- de plus la maîtresse royale a perdu l’ouïe et la vue.

Gabrielle, à droite. Et sa sœur.

La foule Parisienne s’entasse devant la demeure, et il est possible d’entendre « Elle va donc enfin crever cette putain-là ! »  Le  matin du samedi Saint, comme l’avait prédit le devin (c’est son job en même temps), Gabrielle d’Estrées s’est éteinte. En décembre 1599, l’annulation du mariage entre Henri IV et Margot est accordée ; le 17 de ce même mois, Marie de Médicis devient Reine de France, mais c’est une autre histoire.

Cet article est présent dans le tome 1 de Raconte-moi l’Histoire, avec plein d’inédits et d’histoires drôles. Tu veux le lire ?

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Il était une fois, le droit commercial d’Henri IV à la banqueroute.

Sexy  Jean-Baptiste Colbert!

Du XVIème au début du XVIIIème siècle.

Avant Henri IV, il ne se passe franchement pas grand-chose, on échange peu en interne, encore moins à l’international, aucune politique commerciale n’est vraiment nécessaire. Il existe cependant des droits de douane aux frontières avec les péages et  tonlieux. Face à la montée en puissance des cités Italiennes et du commerce anglais, le royaume va se doter d’une politique douanière protectionniste.

Le mercantilisme apparaît au XVIème siècle. L’idée est simple : on accumule les métaux précieux Picsou n’a rien inventé, on défend bec et ongles l’économie nationale face à la concurrence étrangère et enfin on limite les importations à l’aide d’une réglementation du commerce, d’un fort contrôle douanier et on cherche des débouchés pour nos exportations : il faut vendre à l’étranger notre pinard et nos tissus.

  • Des débuts difficiles.

Barthélémy de Laffemas, ministre d’Henri IV à la fin du XVIème siècle, tente de mettre en place un protectionnisme en faveur des fabrications nationales, manufactures et tissus principalement,  dans le but de limiter les sorties d’or du territoire. Quelques années plus tard, le duc de Sully lui succède et souhaite limiter les importations alimentaires. Pour cela, il relance l’agriculture qui, selon lui, doit être capable de nourrir le royaume. Ces tentatives audacieuses resteront sans résultat.

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