Tromelin, l’île des esclaves abandonnés

Salut internet, vous avez beaucoup aimé l’article sur les Oubliés de Clipperton et plusieurs d’entre vous m’ont parlé des naufragés de Tromelin. Si le nom ne me disait rien, je connaissais déjà une partie des faits. Aujourd’hui je vous raconte l’histoire des naufragés de Tromelin et j’en profite pour vous remercier d’exister, de me suivre, de me lire et de toujours m’inspirer !

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L’île Tromelin

L’île Tromelin est une petite île française, clairement ce n’est ni la Corse, ni l’île de Ré… Elle fait 1km², et on y trouve principalement du sable, de l’herbe, des broussailles et quelques arbustes. Le point le plus haut s’élève à 7m et le climat est… comment dire ? L’île se trouve dans l’océan Indien, il y fait entre 20 et 26°c en moyenne toute l’année, mais elle se situe sur le chemin de nombreux cyclones qui n’épargnent rien ! De fait, il n’y a pas d’arbre, pas une seule construction et très peu de vie animale. Faut l’avouer, y’a rien à bouffer, y’a pas d’ombre et pas d’eau douce, c’est pas facile !

L’île a été découverte en 1722 par un navire français : le Diane. Rapidement, elle est baptisée « Île des sables ». Parce qu’il n’y a que ça… Après avoir découvert l’île, on la revendique et on se casse. Il n’y a clairement rien à y faire.

Jusqu’au jour, où…

Le naufrage de l’Utile

En 1761, une frégate française, L’Utile, part de Bayonne pour rejoindre les Indes Orientales. L’équipage compte 142 hommes. Le bateau passe par Madagascar et repart avec 160 personnes de plus. Des esclaves. Des hommes, des femmes et des enfants. Le capitaine doit les déposer sur l’île Maurice (appelée à l’époque Île de France) malgré l’interdiction de la traite par le gouverneur. Au diable les lois, nous sommes au large de l’océan Indien…

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Sauf que ça va merder… Eh oui ! A cause d’une erreur d’orientation, le bateau fait naufrage sur les coraux aux alentours de l’île Tromelin. C’est un peu l’angoisse, le bateau coule rapidement, l’équipage réussit à sortir à temps de l’Utile, mais les esclaves enfermés dans les caves se noient. Seuls 60 parviennent à s’en sortir et à rejoindre l’île avec l’équipage. Ils sont 200 sur 1km², alors on l’avoue aisément, à Paris, c’est bien pire, on compte 20 000 personnes par km². Mais à Paris y’a des maisons, des franprix et des livreurs de pizzas. Sur Tromelin, y’a rien à grailler et aucun endroit pour se protéger du vent.

Rapidement, tout le monde se met au travail, il faut récupérer le plus de bois possible de l’épave mais aussi quelques ustensiles. Ils parviennent même à prendre quelques vivres. Après avoir creusé un puits pour avoir de l’eau presque potable, tout le monde tente de chasser des oiseaux de mer et pêcher pour nourrir tout le monde. C’est le début de la survie. Sans vouloir spoiler, mais un peu quand même, la survie va durer 15 ans pour certains d’entre eux.

La survie sur l’île Tromelin

Sur place, c’est le capitaine du bateau qui gère l’organisation, Jean de Lafargue, ainsi, tout le monde reste à sa place, les échelons sont clairs. Le problème, c’est qu’il vrille complètement, il perd la tête. Sans doute lié à un syndrome post-traumatique, il a perdu son bateau, son argent et a bien manqué perdre la vie. C’est Barthélémy Castellan du Vernet qui le seconde et qui finalement, va prendre sa place. Il propose de construire deux campements. Un pour l’équipage et l’autre avec ce qu’il reste pour les esclaves. Il va même lancer des travaux de construction d’un bateau. Enfin, d’un radeau… A Tromelin, tant que ça flotte, il y a de l’espoir !

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Au bout de deux mois, Bart et ses hommes ont réussi à faire une embarcation pas trop mauvaise. On peut y mettre 122 hommes ! C’est pas mal déjà mais une vingtaine de matelots et les femmes, les enfants et hommes malgaches restent sur l’île avec un petit stock de nourriture. Mais ce n’est clairement pas assez, alors on mange une patte de la moindre tortue qui passe. Pareil avec les oiseaux et bien sûr les poissons. Clairement, avec l’arrivée des hommes sur l’île l’environnement a changé. Tout le monde était pépouze, et maintenant y’a de terribles prédateurs sur Trovelin. Les mecs sont une véritable catastrophe écologique, mais bon, faut bien survivre. Ils découpent des coraux pour en faire des habitations. Et il en faut du corail pour construire un mur ! Avec les plumes d’oiseaux, ils se créent des vêtements tressés. Pour ce qui est des outils, il y a quelques couteaux qu’ils affûtent sur des galets et utilisent des gamelles rescapées du naufrage comme récipients, c’est pas terrible mais c’est toujours ça.

La chose assez incroyable, je trouve, c’est que les naufragés de Tromelin ont réussi à garder le feu allumé pendant 15 ans. Jusque là, même dans Koh-Lanta ils peuvent le faire. Mais le truc, c’est qu’il n’y a pas un seul arbre sur l’île… Deux palmiers tout au plus. Il y a bien l’épave du bateau, mais ça ne fournit pas du bois pendant 15 ans…

Barthélémy Castellan de Vernet

Barthélémy est donc parti sur son radeau avec une partie de l’équipage et après quatre jours en mer, ils ont atteint la côte de Madagascar, puis la Réunion et enfin l’île Maurice. Il demande à ce qu’on lui prépare un bateau pour venir chercher les esclaves et le reste de son équipage. Le gouverneur refuse catégoriquement une première fois, puis une deuxième et une troisième et… bref. Quelle est la raison ?

Le gouverneur a interdit le trafic d’esclaves malgaches pour éviter des conflits entre les deux îles et Lafargue et Castellan sont passés outre la loi. Alors maintenant que Lafargue est mort, Barthélémy Castellan se démerde avec sa culpabilité. Il ne peut rien faire et pourtant, il insiste. Ensuite, il rentre à Paris où il parle du problème, une partie du milieu intellectuel parisien se soulève, et puis c’est la guerre de Sept ans et la Compagnie des Indes fait faillite, alors… on oublie les naufragés…

Les tentatives de sauvetage

En 1773, le feu brûle toujours sur l’île et un bateau qui passe au large se rend compte qu’il y a du monde sur l’île mais impossible de s’approcher, alors il les signale auprès des autorités. Enfin le pays décide de faire quelque chose pour sauver les naufragés de Tromelin. Un navire de sauvetage est envoyé la même année. C’est un échec. Le capitaine n’arrive pas à atteindre la côte, il n’y a pas assez de fond, il y a des rochers et des coraux. En 1774, un deuxième bateau est envoyé : La Sauterelle. Deuxième échec. Cependant une chaloupe réussit à s’approcher et un marin rejoint les naufragés à la nage. Ils vont attendre plusieurs mois l’arrivée d’un autre bateau en vain… Le marin construit alors un radeau, il embarque avec six naufragés, trois hommes et trois femmes en 1775. On ne les a jamais revu. Le radeau a disparu en mer. Et puis ENFIN, le 29 novembre 1776, le chevalier de Tromelin envoie une corvette : La Dauphine. Il ne reste plus que huit survivants sur l’île. Sept femmes et un bébé. Tout le monde est sauvé et en hommage on donne le nom du bonhomme à l’île.

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En 1947, en métropole, on s’intéresse à l’île. Par sa situation géographique, on peut y installer une station météorologique. Aujourd’hui, elle est encore en place et fonctionnelle.

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6 thoughts on “Tromelin, l’île des esclaves abandonnés

  1. Pingback: Histoire - lileauxidees | Pearltrees

  2. Un album jeunesse intitulé « Les Robinsons de l’île Tromelin » (Belin Jeunesse) narre le destin de Tsimiavo qui fit partie des « esclaves oubliés » sur ce banc de sable balayé par les vents. Une partie documentaire relatant les fouilles menées sur l’île par Max Guérout et son contexte historique complète le récit.

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