Klaus Barbie, l’histoire du « Boucher de Lyon »

Le 11 mai dernier, on a fêté les 30 ans du procès de Klaus Barbie, pour l’occasion pas de cotillons ni de musique de fête mais je vous conseille plutôt une exposition lyonnaise au Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation et cet article sur le « Boucher de Lyon ». Ça prend aux tripes, parfois même, disons-le, ça donne la gerbe.

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Klaus Barbie, du nazillon au chef de la Gestapo

Nikolaus Barbie, appelé Klaus Barbie est né à Bad Godesberg (aujourd’hui il s’agit d’un quartier de la ville de Bonn) le 25 octobre 1913. Après son baccalauréat, il décide d’adhérer aux Jeunesses Hitlériennes en 1933 (voir aussi Irma Greese). C’est une révélation pour Klaus Barbie, il adore ça et assimile l’idéologie à fond. Aussi, deux ans plus tard, il intègre la SS et travaille au sein du service de sécurité du parti nazi. Force est de constater que le mec travaille bien, il suit toutes les formations et s’investit comme aucun autre de ses collègues. Aussi, il entre à l’école d’officier en 1937. C’est le début de sa célèbre carrière en tant que SS… Klaus Barbie gravit les échelons rapidement, en avril 1940, il est nommé sous-lieutenant SS. C’est classe. Tellement classe qu’il parvient à séduire une jeune femme rencontré au parti nazi : Regine Willms. Ils auront deux enfants et resteront mariés à vie.

Rapidement Klaus Barbie se fait repérer par les chefs nazis, il est aimable avec ses collègues, détestable avec le reste de l’humanité, il fait du bon boulot du coup, on décide de l’envoyer au Pays-Bas après l’invasion du pays en 1940. D’abord à La Haye puis à Amsterdam. Son job est simple : il doit traquer les juifs, les francs-maçons et les émigrés allemands. Il rafle tout le monde, organise des pelotons d’exécution et on le remercie. Il est promu lieutenant SS et est décoré de la croix de fer de seconde classe en 1941. Ensuite, direction la Russie où il suit notamment un stage de parachutiste. Enfin, Klaus Barbie va être amené à travailler en France où il devient « le Boucher de Lyon ».

Le Boucher de Lyon, le travail de Klaus Barbie en France

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En 1942, Klaus Barbie s’est fait une petite réputation dans le milieu nazi, il n’a que de bonnes recommandations et il parle le français, c’est pourquoi il est nommé chef de la sécurité à Gex (dans l’Ain) tout proche de la frontière suisse, avec une mission bien particulière : il doit enlever un homme. Un agent secret russe qui réside à Genève : Alexander Foote. Lorsque Klaus Barbie parvient à soudoyer des gardes à la frontière et arrive à Genève, Foote a déjà disparu, alors en juin 1942, Klaus Barbie est envoyé à Dijon, puis à Lyon où il devient le chef de la Gestapo. C’est dans l’exercice de la torture que Klaus Barbie va véritablement briller. Y’a pas à dire, il fait du bon boulot. De nombreux résistants passent entre ses mains, notamment Jean Moulin, il connaît les façons de les faire céder et ceux qui ne cèdent pas sont tués. La population civile est terrorisée, menacée, mutilée et tuée lorsqu’on la soupçonne de soutenir la Résistance et Klaus Barbie n’y va pas de main morte. Parmi ses victimes on compte également de nombreux juifs envoyés à Drancy, puis Auschwitz. Et enfin, les 44 enfants d’Izieu raflés le 6 avril 1944 (ici, peu avant leur déportation).

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L’influence de Klaus Barbie est tellement importante qu’il a réussi à faire partir un dernier train (qui n’était pas prévu) en direction des camps de concentration, pas moins de 650 personnes (342 non-juifs et 308 juifs)… En septembre 1944, Klaus Barbie reçoit les compliments du commandant SS Wanninger qui le juge : « discipliné, travailleur, honnête, amical, bon camarade, officier irréprochable » et apte à une promotion au grade de capitaine SS : « Klaus Barbie est connu au Quartier général comme un chef SS enthousiaste, qui sait ce qu’il veut. Il a un talent certain pour le travail de renseignement et pour la recherche des criminels. Sa plus grande réussite réside dans la destruction de nombreuses organisations ennemies. (…). Barbie est [un officier] sur lequel on peut compter aussi bien sur le plan psychologique que sur le plan idéologique. Depuis sa formation et son emploi au sein du SD, Barbie a mené une carrière assidue en tant que directeur d’un service supérieur et, s’il n’y a pas d’objection, il est recommandé qu’il soit promu SS-Hauptsturmführer.»

Lors de la libération de la France, Klaus Barbie parvient à fuir en direction de l’Allemagne. Jusqu’à la fin de la guerre, il est capitaine SS à Wuppertal. Ça va être le début d’une longue cavale.

 Les USA, protecteurs de Klaus Barbie

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A la fin de la guerre, Klaus Barbie est recherché par les Alliés. C’est un criminel de guerre qui doit être jugé et sanctionné pour ce qu’il a fait. Il utilise plusieurs identités et parvient à y échapper, pourtant à la fin de l’année 1945 il tente d’organiser un réseau de résistance nazie. C’est un fiasco pour deux raisons : la population veut en finir avec les nazis et les Alliés mettent les bouchées doubles pour arrêter les membres de ce réseau. D’ailleurs, en 1947 Klaus Barbie est arrêté mais sous un autre nom, il finit par s’évader et intègre ensuite le réseau Peterson dirigé par Kurt Merk. Le réseau est financé par l’armée Américaine et a pour but de surveiller les communistes. L’idée est de savoir s’ils sont nombreux en France et en Allemagne, quel est leur réseau et leur influence à l’international. Lorsque la France l’apprend, elle demande à nouveau à ce qu’on lui remette Klaus Barbie mais c’est refusé. Les USA le cachent pour trois raisons données par les Etats-Unis:

* Compte tenu de son ancien réseau, son aide est précieuse en période de Guerre Froide.

* La France veut se venger et non faire justice.

* La France est gangrenée par le communisme.

Peu importe ce que les USA peuvent bien penser, la France veut et doit récupérer Barbie pour rendre justice. Il est notamment suspecté d’avoir fait tomber Jean Moulin. D’ailleurs le tribunal militaire de Lyon juge par contumace Klaus Barbie (par contumace ça signifie qu’on lui fait un procès malgré son absence), la sanction est claire : la peine capitale. Mais il n’est pas là, il n’est plus aux USA non plus, il a fui en mars 1951 en Amérique du Sud.

Klaus Barbie fuit en Amérique du Sud

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Entre 1951 et 1983, Klaus Barbie se réfugie en Bolivie. Mais la vie n’y est pas paisible, non seulement la France est à ses trousses, mais également l’Allemagne qui l’accuse de vol. Il change régulièrement d’identité, mais c’est sous le nom de Klaus Altmann qu’il s’installe en Bolivie (il obtient rapidement la nationalité car il a été parachuté ici par la CIA). Klaus Barbie dirige différentes entreprises mais elles n’ont pour but que de cacher sa principale activité durant les années 1960, il collabore avec l’armée bolivienne. Il supervise les traques d’opposants et donne des conseils sur les différentes tortures. Y’a pas à dire, le mec excelle dans ce domaine. Il était déjà au turbin lorsque le Che a été capturé dans la jungle bolivienne. Il est un peu le pantin de la CIA et du régime Bolivien, les deux États en font un peu ce qu’ils veulent, ils se le prêtent selon les périodes, selon les situations mais les deux lui promettent protection contre ses services. Et il a bien besoin d’être protégé car il a du monde qui lui colle aux basques. L’Allemagne et la France savent que le Boucher de Lyon est en Amérique du Sud, mais il joue de ses différentes identités.

 L’identité de Klaus Barbie découverte

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C’est sa fille qui va le trahir. En 1969, sa fille Ute Altmann (épouse Messner) demande un visa pour l’Allemagne. A cette époque, on ne file pas les visas comme des bonbons, alors en enquêtant, l’Allemagne découvre qu’elle est la fille de Klaus Altmann, le célèbre et recherché Klaus Barbie. En 1971, l’instruction est à nouveau ouverte, tous les services fédéraux de la RFA sont sur le coup. Ils veulent faire tomber Klaus Barbie. En 1972, il est interviewé par Ladislas de Hoyos, un journaliste français qui le piège clairement en lui faisant parler en allemand et en lui parlant en français. Mais aussi en lui faisant tenir une photo de Jean Moulin, non pas pour le faire se trahir, mais pour qu’il dépose ses empreintes digitales sur le papier Ladislas de Hoyos va tenter de le faire tomber avec son ADN.

Le reportage est diffusé à la télévision. Simone Lagrange, une victime de Klaus Barbie le dénonce. C’est le début de la médiatisation du dossier Klarsfeld contre Klaus Barbie. La Bolivie se défend mais personne n’est dupe, le pays protège l’ancien nazi avec l’autorisation des USA.

L’extradition en France et le procès de Klaus Barbie

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Suite au piège tendu par Ladislas de Hoyos, Klaus Barbie est retrouvé en Bolivie sous le nom de Klaus Altmann et il avoue le 22 avril 1973 au journal O globo être Klaus Barbie. Mais la Bolivie profite de sa position de force et accepte de rendre le Boucher de Lyon à la justice française qu’à condition que la France lui verse une aide importante au développement du pays. Et ce n’est pas des tickets resto ou des bouquins scolaires, non plutôt des tonnes d’armes. Le 5 février 1983, Klaus Barbie est enfin envoyé en France et directement en prison. Le procès débute seulement quatre ans plus tard, en mai 1987 et dure neuf semaines. Durant celui-ci les témoignages des victimes ou proches des victimes sont bouleversants. Une femme raconte avoir vue une femme obligée d’avoir des relations sexuelles avec un chien sous les yeux de Klaus Barbie, ou encore la vision de nourrissons jetés au sol sous les yeux des parents, une autre a eu les jambes tant de fois cassées qu’aujourd’hui elle ne peut plus marcher, beaucoup pleurent et demandent que justice soit faite sans plus tarder.

Le 4 juillet 1987, le Boucher de Lyon est reconnu coupable de 17 crimes comme l’humanité et est condamné à la prison à perpétuité pour « pour la déportation de centaines de Juifs de France et notamment l’arrestation, le 6 avril 1944, de 44 enfants juifs et de 7 adultes à la maison d’enfants Meyzieu et leur déportation à Auschwitz »

 Le 25 septembre 1991, Klaus Barbie décède d’un cancer du sang et de la prostate à l’âge de 77 ans.

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Voici deux livres importants pour approfondir la vie de KLaus Barbie : Nom de code : Adler et L’agent américain Klaus Barbie.

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9 thoughts on “Klaus Barbie, l’histoire du « Boucher de Lyon »

  1. Il était encore vivant en 91?? Impressionant comme score… Quelle ordure, ce type! Le pire étant Mengele, qui n’a jamais été chopé!

  2. Je pense qu’il y a une erreur sur la phrase : « Peu importe ce que les USA peuvent bien penser, la France veut et doit récupérer la France pour rendre justice. » ca serait pas plutot : Peu importe ce que les USA peuvent bien penser, la France veut et doit récupérer Klaus Barbie pour rendre justice.

  3. Les sadiques sont tous les mêmes ,ils portent de beaux masques en société ,mais dés qu’ils peuvent faire une partie de cul torride,sans risque d’être châtiés, ils se défoncent .
    Sale race ces sadiques ,pourtant ils sont adulés par le pouvoir .Rappelons nous Beria et sa clique en URSS ,par exemple .

    • Les empreintes digitales du moins, je suppose. La technique est connue depuis le XIXème siècle à peu près.

  4. Il ne méritait qu’une balle dans la nuque et malgré le serment d’Hippocrate j’espère que les toubibs de sa taule y ont été mollo avec la morphine et les anti douleurs,qu’il ait bien senti passer sa leucémie…

    Une raison de plus (s’il en fallait ^^) pour me faire détester un peu plus les USA.

    • Il faut être d’une grande naïveté pour croire que « les élites » respectent nos vies.Pour ces gens nous sommes du bétail sans valeur ,mais comme ils sont très minoritaires,ils nous font croire que nous sommes précieux pour que nous ne nous révoltions pas face a leurs crimes . Les guerres ,ça vous parle ?

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