HÉLIOGABALE, L’EMPEREUR PREMIÈRE DRAG-QUEEN DE L’HISTOIRE ?

Heliogabale est un homme passionné par l’androgynie et portant des robes de soie. On l’appelle l’Empereur aux caprices ou l’Empereur pervers… Il a été élevé par des femmes et alors qu’il est à la tête de l’Empire Romain il laisse ses frasques prendre le dessus jusqu’à se faire de nombreux ennemis. D’ailleurs, ce sont ses rivaux qui ont écrit son histoire, il faut prendre avec des pincettes tous les faits énoncés. Il est facile d’exagérer et parfois même d’inventer des actes pour briser la réputation de quelqu’un, on l’a déjà vu avec l’histoire de Cléopâtre ! De plus, la damnatio memoriae a fait son œuvre. Nous n’avons que très peu d’informations sur lui.

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UNE FAMILLE PUISSANTE, GÉRÉE PAR DES FEMMES

Bassianus, le futur Héliogabale naît en 208 dans une famille de souche syrienne bien implantée dans la ville d’Emèse. Au IIIème siècle de notre ère, les naissances de leurs fils sont une aubaine pour les quatre femmes dont Julia Domna, Julia Maesa(sa soeur), Julia Soaemias (sa fille et mère de Bassianus) et Julia Mammaea (son autre fille) qui prennent très vite un rôle politique important. Ensemble, elles vont manigancer pour mettre leur enfant, petit-enfant et neveu dans les plus hautes strates de la société.

GRAND-PRÊTRE AUTOPROCLAMÉ, BASSIANUS DEVIENT ELAGABAL OU HÉLIOGABALE

b5f77eb64bcc87017e66fc9553248724c6bfb535La ville d’Emèse (actuellement Homs en Syrie) se situe sur la route entre Palmyre et la Méditerranée, on y adore un Dieu solaire, Elagabal (El = seigneur Gabal= montagne) ou le Seigneur des hauteurs. Sur place, on ne trouve pas d’image du Dieu, mais un bétyle noir, une pierre conique comme tombée du ciel. Il existe de très nombreux adorateurs qui le couvrent d’offrandes, d’or et d’un manteau de soie brodée de mille pierres précieuses. Malgré le passage récurrent des marchands et des soldats, le culte d’Elagabal ne prend pas à Rome.

A l’âge de 13 ans, Bassianus s’autoproclame grand-prêtre du Seigneur des hauteurs et prend son nom Elagabal, ou Héliogabale. Les femmes de la famille n’y sont pas pour rien, tout comme son accès au pouvoir à Rome qui ne tarde pas à arriver.

L’ACCÈS AU POUVOIR D’HÉLIOGABALE

A la mort de Caraccalla en avril 217, Julia Soaemias profite de la ressemblance physique de son fils avec le défunt pour déclarer qu’il est son fils illégitime mais légitime pour le trône. Les femmes puissantes réussissent à convaincre l’armée de nommer Héliogabale Empereur sous l’identité de Marcus Aurelis Antoninus. Il faut savoir que Caracalla régnait en duo avec Macrin, qui occupe Antioche. L’armée se retourne alors contre Macrin et Héliogabale se retrouve seul au pouvoir de tout l’Empire romain en juin 218. C’est une histoire un peu résumée mais vous pouvez en apprendre plus ici.

Les Romains offrent un accueil triomphant à Héliogabale, faut dire que sa famille a arrosé tout le monde de pièces d’or et a déjà baissé les impôts pour se mettre le peuple dans la poche. Et ça marche ! Si Héliogabale est Empereur, Ce sont sa mère et sa grand-mère qui tiennent les rênes de l’Empire. Elles créent d’ailleurs un sénat de femmes siégeant au Quirinal, c’est Julia Maesa qui le préside. Julia Maesa est une des premières femmes à dépasser le rôle traditionnellement réservée aux femmes dans la société romaine. Toute la société, le sénat et l’armée la reconnaissent et légitiment ses prises de décisions. Son petit-fils, lui, il ne fout pas grand-chose.

LE MARIAGE D’HÉLIOGABALE AVEC UNE VESTALE

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Le seul truc qui l’intéresse c’est la religion. Il prend la charge de prêtre du Seigneur des Montagnes. Pour se purifier, il se fait circoncire et cesse de manger de la viande de porc, de plus, il a déplacé le bétyle d’Emèse à Rome, dans le palais impérial du Palatin. Héliogabale rend obligatoire les rituels du Seigneur des Montagnes. Les cérémonies comportent beaucoup de musique, les patriciens romains portent sur la tête des vases en or contenant des viscères de brebis et taureaux sacrifiés quelques heures avant sur l’autel du Dieu. En 221, il est décidé de déplacer le bétyle dans un temple construit spécialement en son honneur. On le pose alors sur un char attelé de six chevaux blancs. Fait plus étonnant, il n’y a pas de conducteur. C’est le Dieu lui-même qui dirige la procession. L’histoire ne nous dit pas quand et comment se termine la course. Mais une fois le bétyle en place, Héliogabale monte à l’étage du palais et fait jeter sur la population des coupes en or et des animaux vivants. Des personnes meurent sous le poids des projectiles… C’est quand même con…

Héliogabale veut étendre son culte à l’Empire Romain qui semble bouder le bétyle sacré. Tout d’abord, il décide de célébrer une hiérogamie (un mariage entre deux divinités) entre le Dieu Soleil et Vesta. Au même moment, il enlève la vestale Aquilia Severa et l’épouse.
« J’agis ainsi pour que des enfants divins naissent de moi, le grand prêtre, et d’elle, la grande prêtresse. »
Sauf que ça ne se passe pas comme ça, on ne touche pas aux vestales, ces prêtresses de Vesta, garantes du feu sacré et de la chasteté ! Il n’en fait qu’à sa tête et politiquement, ça ne passe pas. Les Romains sont outrés, la vestale garantit la sécurité de la ville ! Heureusement, aucun enfant ne naît de cette union. Les vestales doivent rester vierges et intactes de toute forme de souillure sexuelle. Une vestale qui perd sa virginité est accusée d’inceste et enterrée vivante pour expier son crime. On peut dire qu’Héliogabale a fait une connerie là… Et petit à petit, l’Empereur se met toute la population à dos…

HÉLIOGABALE, EMPEREUR ANDROGYNE ET TRAVESTI

Héliogabale n’a pas la carrure d’un soldat de l’Empire, il porte des vêtements de prêtres, de longues robes colorées, il est chargé de bijoux et ne sort jamais sans un maquillage très travaillé. Aussi, ses airs androgynes lui attirent les foudres de tout le monde, en particulier des troupes de l’armée, et les ragots vont bon train. On raconte qu’il fréquente tout autant les femmes prostituées que les réseaux homosexuels, et qu’il passe plus de temps dans les lupanars de Rome ou dans la chambre de son palais réservée à son intimité qu’à gouverner le pays. Ce qui est tout à fait probable car ce sont les femmes de sa famille qui tirent toutes les ficelles de la politique.

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En ce qui concerne l’amour, Héliogabale serait tombé fou amoureux d’un cocher, Hiéroclès, qui traiterait l’Empereur comme sa femme. C’est à dire, qu’il le soumet, le tabasse puis l’abandonne… Héliogabale aime se montrer avec les traces de coups de son mari, comme une vraie femme. Bah oui, c’est ainsi qu’on traite une épouse durant l’Antiquité.
Certains disent que l’Empereur avait une sexualité hésitante, parfois avec des hommes, parfois des femmes. En réalité, Héliogabale ne cherchait pas à faire de choix, il aimait les corps. Ceux des hommes autant que ceux des femmes. Dion Cassius explique qu’Héliogabale aurait souhaité se faire inciser le pubis pour connaître la même sexualité qu’une femme et connaître une bisexualité parfaite.
Hélas, ce n’est pas tant la sexualité de l’Empereur qui va lui coûter son titre plutôt que ses nombreuses et très coûteuses excentricités !

LES « FRASQUES » D’HÉLIOGABALE SELON LE PEUPLE

Si la sexualité appartient à chacun, dès qu’on touche au pognon, le peuple grogne ! Héliogabale ne mange pas particulièrement de homard, mais il se délecte de langues de paon et de rossignol, de cervelles d’autruche ou encore de talons de chameau… Les banquets sont toujours riches et les plats extravagants. Ce que l’Empereur aime par-dessus tout, c’est le repas à thème. Un été, Héliogabale a souhaité servir un banquet avec des plats d’une seule couleur chaque jour… Un coup tout est rouge, le lendemain, tout est jaune. Les chefs devaient user d’imagination et de savoir-faire pour satisfaire le chef d’Etat. Apicius a élaboré de nombreuses recettes pour l’Empereur. D’ailleurs, à sa mort, Héliogabale pesait lourd et avait dit on « le visage empâte et flétri ». Pour égayer les banquets, le chef d’Etat a l’habitude d’inviter systématiquement : 8 chauves, 8 borgnes, 8 obèses,  géants, noirs, ou encore tout autant de personnes atteintes de la goutte. Juste comme ça, ça l’amuse et divertit ses convives de voir les invités surprises installés autour d’une table circulaire. Autre blague, si l’on peut dire. Il fait servir de faux aliments en cires à ses invités qui s’escanent et s’en mettent plein les dents…

La meilleure de ses blagues et probablement d’enfermer ses convives ivres morts dans une pièce dans laquelle il lâche un ours, un lion ou un léopard apprivoisé et inoffensif. Quand les mecs, en pleine gueule de bois, se réveillent, ils ont une peur bleue et certains font des malaises de peur. Ambiance… Mais à force de jouer avec le feu, le jeune Empereur se brule les ailes.

LA FIN DU RÈGNE DE L’EMPEREUR

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Après trois ans de règne, les soutiens d’Héliogabale s’étiolent et s’il garde le pouvoir, il le perd bêtement en pensant se faire des alliés. Faut dire que l’Empereur n’est pas un fin stratège, les seules choses qui paraissent lui importer sont les blagues potaches, le sexe et ses perruques.  En juillet 221, Julia Maesa se rend bien compte que son petit-fils n’a pas l’âme d’un Empereur mais il est important pour la famille qu’il conserve le pouvoir alors elle décide de lui faire adopter son cousin : Alexianus Bassianus qui devient associé au pouvoir. Le mec est fun comme un militaire : sévère, avisé, patient. De fait, il se met dans la poche toute l’armée. Surtout que les vieux Romains n’aiment pas que ce soit des femmes à la tête du territoire et qu’un homme aussi excentrique soit leur représentant. L’Empereur n’apprécie pas que le vent tourne ainsi et décide de s’en débarrasser avant qu’on le renverse pour le mettre officiellement à sa place. Hélas, les menaces qui courent sur Alexianus Bassianus arrivent aux oreilles des troupes le 21 mars 222 et un groupe de soldats envahit le palais impérial et violente Héliogabale. Finalement, son corps est trainé à travers les rues de la ville puis jeté dans le Tibre… Au même moment Sévère Alexandre devient Empereur et quelques jours après, la pierre retourne à Emèse… C’est la fin d’Héliogabale !

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#ArkéAube, la vie dans l’Aube du Néolithique à l’Age du Fer

Lors de ma visite à ArkéAube, une exposition dans la ville de Troyes dans le département de l’Aube, j’ai pu découvrir que progressivement entre 5300 et 450 avant notre ère les hommes utilisaient des bois de cerfs pour creuser les mines de silex, les femmes portaient des perles venues d’Italie et tout le monde buvait du vin aux épices comme en Grèce. La région auboise était-elle une zone d’échange au cœur de l’Europe avant même les célèbres foires de champagnes médiévales ? Ça se pourrait bien !

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La colonisation de l’aubois au Néolithique, les premiers échanges

Si l’occupation des terres de l’Aube par les hommes nomades – chassant le gibier abondant dans les forets – depuis plus de 200 000 ans est attestée, l’exposition débute sur l’arrivée des premiers colons qui s’installent durablement durant le Néolithique et la disparition progressive des chasseurs-cueilleurs. Déjà peu nombreux, ont-ils été décimés par une épidémie ? Se sont ils mélangés avec les colons ? Impossible de le savoir à l’heure actuelle mais des points communs quand à la forme des flèches ou le goût des perles en dents de cerf laissent penser à une cohabitation, relativement pacifique. Continuer la lecture

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Frances Farmer, d’Hollywood aux électrochocs

Hollywood, cette grosse machine qui fait autant rêver que frissonner d’angoisse… Dans le monde du glamour et des strass, on parle peu de ceux qui s’y sont cassé les dents. C’est le cas de Frances Farmer, jeune femme talentueuse et prometteuse qui a obtenu le rôle de cobaye en médecine… Découvrez son histoire.
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Frances Farmer, jeune fille au tempérament de feu 


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Frances Farmer est née à Seattle -dans l’Etat de Washington- en 1913. Élevée par son père qui subvient aux besoins de ses trois enfants avec aisance, Frances Farmer souhaite rapidement être indépendante et trouve des petits boulots pour financer ses futures études. En 1931, son talent est déjà récompensé, elle remporte un prix de dissertation qui lui vaut déjà de nombreuses critiques. Et pour cause,  Frances Farmer, dans son essai rejette Dieu. C’est son premier succès et c’est aussi son premier scandale. Peu importe. A l’université, elle suit des cours de journalisme, d’anglais et d’art dramatique et joue dans plusieurs pièces étudiantes où elle se révèle être excellente. Elle gagne d’ailleurs un nouveau concours qu’il lui offre un voyage en Union Soviétique. Frances Farmer s’empresse de partir malgré les inquiétudes de son père, mais il est trop tard. A son retour Frances Farmer se paie la réputation d’être athée et communiste. C’est beaucoup dans le contexte politique  de l’époque pour une seule personne, une femme qui plus est. Les Services de Surveillance Nationale sont sur le coup.

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Le bézoard, pierre magique du XVIème siècle (c’est faux)

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Aujourd’hui, on parle d’histoire de la médecine, ou plutôt, histoire des croyances car la thématique du jour n’a jamais vraiment soigné personne. Bien au contraire. Dirigeons nous vers le XVème siècle pour découvrir le bézoard, qui en persan, signifie « contrepoison ».

Le bézoard, qu’est-ce que c’est ? 

Le bézoard (ou bézoar) est une pierre, riche en phosphates, que l’on retrouve dans les estomacs de nombreux ruminants, notamment les chèvres, mais aussi des humains, parfois. Le bézoard est donc un corps étranger formé de débris végétaux, et/ou de cheveux ou poils que les animaux accumulent par le léchage.

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Le véritable bézoard se trouve dans l’estomac d’une race de chèvre orientale appelée « capra aegagrus » et se retrouve en Europe et à la cour de France car les croyances populaires lui accordent de nombreuses vertus. Mais rapidement, toutes les concrétions pierreuses font l’affaire et de nombreuses chèvres sont découpées pour tenter de trouver le précieux médicament ! D’une manière générale, un bézoard fait la taille d’une noisette mais peut devenir aussi gros qu’un œuf de poule. Plus il reste longtemps dans l’estomac de l’animal plus il est lisse, brillant, bien rond et vert olive. Évidemment, le bézoard qui possède toutes ces qualités se vend à prix d’or.

La croyance populaire autour du bézoard

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Selon la pharmacie primitive, le bézoard est une pierre miraculeuse qu’il suffit de gratter pour en faire de la poudre à absorber. Les effets sont divers et variés selon les peuples et les époques.

La civilisation persane utilise des bézoards comme antidote de premier choix et pense que ces pierres repoussent les animaux venimeux ou porteurs de maladies. Ou croit encore à ses effets aphrodisiaques ou d’un médicament capable de ralentir le vieillissement s’il est pris en cure deux fois par anContinuer la lecture

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