Murano, l’histoire des plus célèbres verriers italiens 

Tout commence par une interdiction ! Eh oui, alors que le travail du verre s’effectue à Venise depuis plusieurs siècles, lors de la République en 1291, toutes les verreries sont contraintes de fermées et les verriers vénitiens s’installent alors sur l’île de Murano. 

En 1295, la société Barovier & Toso voit le jour, aujourd’hui, elle est considérée comme l’une des plus anciennes du monde.


Ancienne maison de la verrerie artistique d’Antonio Barovier à Murano. Photo par Paolo Monti.

Pourquoi les verriers sont-ils sommés de déménager à Murano ?

Les verriers sont installés à Venise depuis le début du Xème siècle. Il existe des documents prouvant le travail du verre datant de 982 et de 1087 mais il faut savoir que le savoir-faire est byzantin et lors des différentes croisades, les artistes fuient Constantinople et s’installent à Venise sa région. Certains verriers s’installent même directement sur la petite île de Murano, à quelques kilomètres au nord de Venise. En 1271, la magistrature décide de reconnaître officiellement les verriers comme des artisans avec des droits et des devoirs liés à leur profession. Une bonne nouvelle pour eux mais vingt ans plus tard, en 1291, de nombreux incendies ravagent la ville de Venise et les choses changent.

Le doge de Venise en visite à Murano

Les fonderies sont construites en bois et la chaleur qui émane des fours jour et nuit effraient les autorités, notamment les membres du Maggior Consiglio,  qui décident de détruire tous les établissements et ordonnent aux verriers de s’installer en dehors de la ville. En échange, le commerce est protégé par la République de Venise. Seuls les fours de Murano peuvent être utilisés et exclusivement par les verriers enregistrés dans les registres de l’Etat.

C’est à partir de cette époque que les verres colorés deviennent le symbole de l’île et les produits se vendent partout en Europe comme des objets de référence et de grande qualité.

La protection des verriers par la République de Venise

Le commerce du verre est florissant, les monarques européens ne jurent que par le verre de Murano de fait, au XIVème siècle les maîtres verriers obtiennent de nombreux privilèges. Tout d’abord, ils peuvent porter l’épée, ils peuvent se lier par le mariage aux familles les plus riches et puissantes de Venise et ils bénéficient d’une immunité de poursuite par l’Etat. Une aubaine ! Enfin… Il existe bien une contrepartie : les verriers ne sont pas autorisés à quitter la République de Venise afin que le monopole de la fabrication du verre de qualité reste entre les mains des Vénitiens. Pendant des années, les verriers développent de nombreuses techniques comme le lait de verre, les verres multicolores, les parures au fil d’or… 

XVI et XVIIème siècles : mauvaise passe pour le verre de Murano

Pendant des siècles, Murano a le monopole du travail et du commerce du verre mais certains verriers, malgré la protection assurée par la République, décident de s’installer dans les villes aux alentours, et à l’étranger jusqu’à créer une concurrence sévère au verre de Murano. Il est donc primordial pour les artistes de trouver de nouvelles techniques, de les développer et les maîtriser à la perfection, ce sera le cas avec le cristal, le girasol (ou opaline). 


En 1630, la peste a envahi toute la péninsule italienne et l’île de Murano n’est pas épargnée, de nombreux artisans disparaissent et avec eux, une partie de leur savoir-faire !

Comment reconstruire l’empire de Murano ?

C’est au XVIIIème siècle que le verre de Murano renaît de sa braise, les verriers produisent différentes formes et couleurs et se diversifient dans la confections d’objets, on trouve toujours des verres à boire, mais aussi des plateaux à étages, des encadrements de miroirs et de nombreux objets d’art. Le commerce va bon train, il n’a pas retrouvé l’essor des XIV et XVème siècles mais il y a de quoi vivre. En 1861, l’abbé Vincenzo Zanetti, après avoir passé plusieurs années à rassembler des pièces, décide d’ouvrir le musée d’art verrier de Murano. Les verriers peuvent alors observer d’anciens objets, comme les murrine romaines, les émaux de feu ou encore les décorations à la feuille d’or, et analyser toute une partie du savoir-faire perdu durant la peste noire. L’inspiration renaît sur l’île de Murano et pendant près d’un siècle, de grands artistes contemporains proposent des designs innovants ! 


Picasso, Chagall, ou encore Le Corbusier ont posé leurs valises à Murano pour travailler avec de grands maîtres verriers.

Et aujourd’hui, quoi de neuf à Murano ?

La technologie est venue prêter main-forte aux maîtres verriers. Si le travail à la main reste valorisé par le savoir-faire précis et séculaire des artistes, les fours eux ont été améliorés pour offrir aux verres des températures jusqu’à 1300°c, réduisant ainsi le nombre de jours de fonte. Aujourd’hui, les fours montent jusqu’à 1700°C pour créer un verre transparent, incolore, “le cristal de Venise”.

Aujourd’hui la qualité du verre de Murano n’est plus à prouver, de nombreux produits iconiques sont vendus dans le monde entier, comme les vases, les lustres, les animaux ou encore les perles. Découvrez le petit guide parfait pour déceler le vrai du faux verre de Murano !

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