Casanova, l’abbé devenu célèbre libertin

Tout le monde connaît Casanova. Au moins de réputation… Un coureur de jupons, un séducteur, il les fait toutes craquer… En réalité, la personnalité de Giacomo Casanova est très intéressante et assez surprenante, révélatrice de la société du XVIIIe siècle. C’est pourquoi, je vous ai écrit cet article.

L’enfance de Giacomo Casanova

Le petit Giacomo est né le 2 avril 1725 à Venise, il est le fils de Gaetano Casanova et de Zanetta Farussi. Les deux sont acteurs et ont cinq autres enfants après la naissance de Giacomo Casanova. Vous vous en doutez, Giacomo est le prénom Jacques en italien. Pour des raisons évidentes de sexytude, nous allons l’appeler Giacomo tout le long de l’article. Le pauvre gamin n’a pas une très bonne santé, il est tout maigre et malade, mais il est heureux, il mange à sa faim et il reçoit une bonne éducation. Lorsque ses parents sont en tournée, c’est sa grand-mère maternelle Marisa Farusso qui l’élève, soit quasiment tout le temps jusqu’à ses dix ans. Ensuite, il quitte la maison familiale pour rejoindre l’école de l’abbé Gozzi puis il entre à l’université de Padoue pour apprendre le droit et la philosophie. Finalement, il se destine à devenir avocat ecclésiastique en obtenant un doctorat en droit canonique en 1742. Et sans rire, j’ai fait du droit canonique pendant deux ans, j’avais envie de chialer, je sais pas comment le mec a pu faire une thèse à ce propos…

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Faut avouer qu’il avait d’autres loisirs, une des servantes de la famille raconte être passée à la casserole dans les bras de Casanova alors qu’il n’avait que 15 ans ! Bref. Le mec entre dans les ordres et à l’époque, c’est plutôt classe.

Casanova, homme d’Eglise, militaire et grand joueur

Le 14 février 1740, Giacomo Casanova reçoit la tonsure. Je vous rappelle qu’un mec qui reçoit la tonsure fait don de lui-même à Dieu. Il rompt avec tous les plaisirs surtout charnels. Il passe de l’état d’homme laïque à homme d’Eglise. Certains religieux en plus de se soumettre à la tonsure, connaissaient la saignée. C’est à dire qu’ils offraient un peu de leur sang à Dieu ; en hommage, en signe de soumission. Bref, le 22 janvier 1741, Giacomo Casanova devient abbé de l’église San Samuele. Mais en fait… Ça ne va pas durer. Ben non… Fidèle à la réputation sulfureuse qu’il n’a pas encore, il va devoir quitter sa fonction car il fait un jour un sermon complètement bourré… Rompre avec la vie normale, ok mais à condition de picoler le vin de messe… Je serais curieuse de connaître le fond et la forme de ce sermon. Malgré tout Casanova va rester dans le milieu religieux, à l’aide d’un ami qui le prend sous son aile : le sénateur Malipiero. Malipiero accueille Casanova mais aussi d’autres jeunes adultes dans son palais, et puis un jour, il découvre que Casanova passe plus de temps entre les cuisses de Thérèse Imer, une autre protégée du sénateur, qu’à faire des prières, alors c’en est trop ! Il le chasse et Casanova part pour Naples, puis Rome. A Rome, il va faire la connaissance du pape Benoit XIV et du cardinal Acquaviva, qui va gracieusement le loger. Fatale erreur. En 1744, Acquaviva découvre que Casanova s’envoie en l’air avec sa fille… Pour draguer, le jeune Casanova s’amuse à faire lire la Puttana Errante, soit les œuvres de Pierre l’Aretin que l’on connaît bien sur Raconte-moi l’Histoire.

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Cette fois-ci Casanova n’a plus aucun soutien, il est obligé de se laisser pousser les cheveux et d’abandonner la soutane. Mais il rebondit vite. Le mec, on dirait Christophe Rocancourt, il cumule les activités illégales et les identités. Il va devenir tout au long de sa vie bibliothécaire, lieutenant de vaisseau dans la marine militaire, violoniste au théâtre de Saint-Samuel, financier, joueur professionnel… En réalité, c’est un escroc. Il alterne entre la vie dans les palais et dans les prisons. Il va même se faire passer pour un sorcier…Il prétend avoir sauvé le sénateur Matteo Bragadin. Finalement, le mec le prend sous son aile et lui file énormément de fric, grâce à cet argent tombé du ciel, Casanova s’en va en 1750 découvrir la vie parisienne !

L’aventure parisienne (et coquine) de Casanova

Casanova arrive à Paris en juin 1750 avec son ami Antonio Balleti. Ce sont les parents de Giacomo qui ont réussi à les intégrer dans le cercle très fermé des comédiens italiens alors en tournée à Paris. Au passage, Casanova va pécho Manon Balletti, fille de Mario et Silvia Balletti. Enfin, il va faire un peu plus que la trousser, en réalité, il va la demander en mariage. Les deux jeunes sont fiancés puis Casanova se casse vers d’autres cieux… Obligé de quitter la troupe de comédiens italiens, Casanova n’a plus de protecteur… Puis il découvre Claude-Pierre Pattu… Un avocat et dramaturge libertin qui l’initie rapidement aux plaisirs parisiens mais aussi à la culture, la littérature et les arts français en général… Déjà à Venise ou à Rome, il se fait remarquer pour son élégance et ses connaissances, il en est de même à Paris. Giacomo Casanova ne passe jamais inaperçu. On raconte qu’il a même rencontré la Pompadour. Il dépense l’argent qu’il gagne aux jeux ou à l’aide de business fructueux et puis il quitte la ville.

Le retour à Venise et la fuite contrainte

En 1755, Casanova retourne en Italie, à Venise, il rencontre un abbé : Bernis. Le mec est libertin et ne tarde pas à devenir l’ambassadeur de Venise du roi de France, Louis XV. L’abbé de Bernis est très partageur, c’est pourquoi il permet à son nouvel ami Casanova de rencontrer Marina Maria Morosini, une nonne. Nonne mais pas sainte, elle demande à Casanova de coucher avec elle sous les yeux de son amant, Bernis pour un bon délire candauliste.

Pour ceux qui n’ont pas fait libertinage en LV3, le candaulisme c’est lorsqu’un mec prend plaisir à voir sa compagne dans les bras d’un autre, ou de plusieurs autres et éventuellement d’être un peu humilié. Ca vient du nom du roi de Lydie, Candaule. C’est une autre histoire que je vous prépare.

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Outre le candaulisme, le voyeurisme est une des pratiques préférées des deux compères. Ils ont une garçonnière en commun et l’un se débrouille pour être là, tapis dans l’ombre, lorsque l’autre ramène une conquête. Festival de fap dans le placard. Après quelques mois de débauche, l’abbé doit aller en France rendre des comptes au roi. Il est payé pour ça après tout. Il propose à Casanova de l’accompagner mais celui-ci refuse. Et pourtant, il aurait dû parce qu’il s’est mis dans une mauvaise posture…

Entre les escroqueries financières et le fait de pécho toutes les meufs de la ville, il ne s’est pas fait que des copains… Aussi, va-t-il être arrêté par les inquisiteurs d’Etat. Les motifs ? Libertinage, athéisme et occultisme… Personne ne peut intervenir. Mais au bout de quatorze mois de détention dans la prison des Plombs, Casanova s’échappe. Du moins, c’est ce qu’il raconte dans son Histoire de ma fuite. Le 31 octobre 1756, Giacomo est libre… Enfin… Il n’a pas intérêt à ce qu’on le retrouve sur le territoire, alors il s’enfuit. Il part à Paris retrouver son copain Bernis.

Casanova, l’escroc occulte

En 1757, Casanova retourne à Paris, il y retrouve son ami Bernis qui est maintenant ministre et il intègre la franc-maçonnerie. Il se plaît à raconter sa cavale. Lui, Giacomo Casanova est le premier homme à s’être échappé des Plombs, la célèbre prison vénitienne, et jamais on ne le retrouvera, qu’il dit ! A l’aide de ses amis haut-placés, il va mettre en place une loterie royale dans le but officiel de financier l’Ecole militaire. Malin comme un singe, il parvient à se mettre un beau pactole dans la poche… Ensuite, il va escroquer la marquise d’Urfé… Ça ne fait que quelques mois qu’il est à Paris et Casanova soigne la sciatique du neveu de la marquise à l’aide d’un pentagramme et de quelques paroles magiques, c’est un succès ! Il va réussir à lui escroquer une grosse somme d’argent en lui faisant croire qu’il pratique la magie (ce qui est vrai, dans le fond) et qu’il peut faire des miracles (ce qui est faux).

La marquise Durfé, qui a une cinquantaine d’années, qui en pince pour le jeune italien et pour les sciences occultes, lui demande de la faire renaître dans un autre corps, plus jeune, afin de pouvoir vivre une seconde jeunesse. 1763, c’est l’année de la régénération de la marquise d’Urfé. Casanova propose à la marquise de la mettre enceinte d’elle-même lors d’un bon threesome des familles.

Pour ceux qui n’ont pas fait Youporn LV1, ça veut dire un trio sexuel, dans ce cas, deux femmes et un homme.

Non seulement ça ne va pas marcher, mais en plus, un homme jaloux de Casanova, Giacomo Passano, va se faire passer pour meilleur magicien et Casanova tombe en disgrâce auprès de la marquise !

Casanova et les femmes…

N’allez pas croire que toutes les femmes tombent entre les griffes de Casanova, loin de là ! En 1764, il rencontre la Charpillon à Londres. Une jeune fille de 17 ans, une prostituée qui se refuse à lui. Elle se joue même de lui et ça le rend complètement zinzin. Il y a laissé des plumes, un peu d’amour propre et surtout du fric. Eh oui, il a payé la jeune fille pour sa présence, sans jamais pouvoir la trousser !

Casanova et la capote

Autre histoire, deux ans après, en 1766, Casanova est en Pologne, à la cour du roi de Pologne Stanislas II (le beau père de Louis XV). Alors qu’il rencontre une danseuse italienne, dans un cabaret, un autre homme l’approche : le général Branicki… Après des insultes et une rixe, le verdict tombe, ils vont s’affronter lors d’un duel au pistolet le 5 mars 1766 à Vola. Les deux mecs se blessent, mais aucun ne décède. Casanova est sommé de quitter le territoire. Ces Polonais n’ont pas d’humour ! Après un séjour Européen, Giacomo Casanova obtient l’autorisation de rentrer à Venise après 18 ans d’exil.

La fin de la gloire pour Casanova

Au tout début de son retour à Venise, c’est plutôt la belle vie… Casanova est accueilli comme une star, une célébrité, on entend parler de lui dans toute l’Europe pour ses écrits en italien mais aussi en français. Il va lancer une troupe de théâtre, ça fait un bide. Il devient à nouveau espion, puis il joue salement avec l’argent des autres alors, il va être à nouveau expulsé de Venise en 1783 suite à un pamphlet. Coté business, c’est moche donc, mais avec les meufs aussi… Eh oui, coup dur pour Casanova qui à 49 ans a le visage recouvert de cicatrices de la variole… Ça n’aide pas pour pécho.

Casanova s’enfuit donc à Paris, où il rencontre Benjamin Franklin, puis à Vienne ou il devient le bras droit de l’ambassadeur de Venise. Il se renferme petit à petit chez lui et part vivre dans le château de Dux où il écrit ses célèbres mémoires Histoires de ma vie, plus de 8000 pages manuscrites qui racontent dans le détail la vie de Giacomo Casanova !

Il décède dans la solitude le 4 juin 1789.

Casanova, la mauvaise réputation posthume

Si aujourd’hui Giacomo Casanova a la réputation d’un tombeur, d’un séducteur à la Don Juan ou encore d’un libertin, ce n’est pas tout à fait vrai. Oui, il a connu des femmes, des jeunes, des vieilles, des prudes, des lubriques et il a toujours refusé de se marier, mais ce n’est pas un collectionneur sans état d’âme. Dans ses mémoires, on peut se rendre compte de la sincérité des sentiments (aussi furtifs soient-ils) qu’il a eu pour ces femmes. Femmes qui à l’époque, n’étaient pas victimes de Casanova, mais plutôt complices (sexuellement j’entends, parce que pour le business, il a escroqué hommes et femmes sans distinction) ! Au XVIIIe siècle, le libertinage est un état d’esprit fréquent qui se vit autant par les hommes que par les femmes. Y’a pas de raison hein… C’est ce qu’on retrouve dans ses mémoires qui semblent dresser un portrait quasi parfait de la société du XVIIe siècle, avant que la Révolution n’obscurcisse tout ça.

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9 thoughts on “Casanova, l’abbé devenu célèbre libertin

  1. Étant une fidéle lectrice de raconte moi l’histoire je vous souhaite que l’aventure dure encore et toujours . Bises.

  2. Je n’ai jamais pris tant de plaisir à m’intéresser à l’histoire… merci de ce résumé pédagogique! Belle récréation! L’éducation nationale devrait s’y référer… Continuez ainsi! Belle vie à vous…

  3. J’aime bien le ton. Une dose d’humour espiègle et une dose d’esprit critique. Juste ce qu’il faut pour qu’on est envie d’aller jusqu’au bout…de l’histoire.
    Bravo. Bonne continuation.

  4. Merci pour cet article! Je crois que c’est l’article qui m’a le plus plu de racontemoilhistoire 😀 Bonne continuation.

  5. Le libertinage d’idées était en effet fréquent à l’époque, mais pas nécessairement le libertinage de mœurs…
    Était-on beaucoup plus libertin (au sens où le mot est utilisé aujourd’hui) au XVIIIe qu’au XXe siècle ? Je ne m’y risquerais pas.

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